Le PSMIR anime une communauté de pratique (CdP) virtuelle composée de prestataires de services de santé, d'établissement et de services sociaux à travers le Canada qui soutiennent la santé mentale des immigrants et des réfugiés. Le forum de discussion en ligne de la CdP permet aux prestataires de poser des questions au groupe d'experts en la matière du projet. Nous vous présenterons quelques-unes des questions posées par les prestataires et les réponses fournies par les experts en la matière.
Question
Quelles sont les stratégies d'intervention auprès des enfants immigrants et refugiés victime d'abus ?
Ghayda Hassan, psychologue, Université du Québec à Montréal (UQAM) répond :
- Prendre conscience de la possibilité de violences institutionnelles et organisationnelles qui contribuent à l'abus (racisme et discrimination institutionnelles, attitudes plus punitives avec les familles immigrantes et réfugiés etc.) et adresser cela avec les parents c'est très important.
- Indiquer toutefois que la violence envers les enfants n'est pas un comportement admissible au Canada et expliquer un peu l'évaluation du pays à ce sujet, afin que les parents comprennent la culture dans laquelle ils se trouvent par rapport à cette question, et expliquer qu'ils peuvent avoir des ennuis s'ils continuent à agir ainsi.
- Comprendre comment la violence s'inscrit dans leur trajectoire, il peut s'agir d'une répétition traumatique, et nous devons traiter le traumatisme. Il se peut qu'ils aient toujours été violents envers leurs enfants, ou que la violence soit apparue après l'immigration en raison de problèmes dans la société d'accueil.
- Offrir un espace d'écoute pour l'enfant à propos de son vécu et reconnaitre que cela fait mal, que vous ne pensez pas que c'est admissible et que cela n'est pas de sa faute. En outre, proposeui une thérapie s'il en a besoin.
- Évaluer les causes de cette violence et orienter l'intervention vers les causes, plutôt que de faire croire aux parents qu'ils ne savent pas comment élever leurs enfants.
- Veiller à ce que l'enfant, s'il doit être placé, le soit dans un environnement culturellement sûr et compétent.
- Offrir une intervention compétence culturellement et non punitive.
- Mettre l'accent sur les points forts des parents et ne pas discréditer leur autorité ou leurs valeurs devant les enfants car cela peut aggraver les conflits parents-enfants.
Debra Stein, pédopsychiatre à Sick Kids répond:
Bien que la violence soit un concept large - englobant la violence verbale, physique, émotionnelle et sexuelle - certaines idées clés s'appliquent à toutes les formes de violence.
- 1) Tout d'abord, il est essentiel de s'assurer que la maltraitance ne se poursuit pas et que l'enfant ou l'adolescent est désormais en sécurité. Pour ce faire, il peut être nécessaire de contacter les autorités chargées de la protection de l'enfance, voire la police, en fonction du type d'abus.
- 2) Si l'enfant ou l'adolescent signale un abus à distance qui s'est produit dans le passé et qu'il se trouve maintenant dans un environnement sûr et sécurisé, il est important d'examiner avec lui si ses parents ou tuteurs savent ce qui s'est passé et s'il se sent en sécurité amener leurs parents / tuteurs dans la conversation. Dans certaines circonstances, les risques liés à la divulgation doivent être pris en compte, par exemple dans le cas d'abus sexuels sur des filles, où la stigmatisation de la victime est considérable et où elle pourrait devenir la cible de reproches et d'agressions de la part d'autres personnes, même des personnes qui s'occupent d'elle.
- 3) S'il y a eu des abus jusqu'à récemment, l'enfant / adolescent peut avoir besoin de stratégies pour faire face aux fortes émotions de peur, d'anxiété, de tristesse et de colère. Il est essentiel de l’aider à mettre des mots sur ce qu'il ressent et de normaliser ces sentiments. Ils peuvent également avoir besoin de stratégies d'adaptation pour les problèmes liés aux traumatismes comme l'insomnie, la faible concentration à l'école, l'irritabilité et les conflits interpersonnels. La résolution de problèmes autour de ces préoccupations peut ou non inclure les parents / tuteurs de l'enfant / adolescent, selon l'âge de l'enfant.
- 4) Enfin, il est vraiment crucial de s'attaquer aux sentiments de culpabilité, de culpabilité et de honte. De nombreux enfants et jeunes ont tendance à se blâmer pour les mauvais traitements, et les mauvais traitements peuvent conduire à toute une gamme de pensées liées à la honte («Je suis mauvais, sale, peu aimable, etc.»). Il vaut la peine d'explorer ces sentiments avec l'enfant et de l'aider à voir que la maltraitance n'était pas de sa faute.
Pour plus d'idées et de conseils, le BOOST Child and Youth Advocacy Centre de Toronto a une excellente série de fiches d'information [en anglais] pour les adultes travaillant avec des enfants / jeunes victimes de maltraitance: information sheets for adults working with children youth